La déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789

Tous les jours depuis le début de l'année, nous passons devant cette affiche, à chaque fois que nous entrons ou sortons de la classe. A force, on n'y fait plus attention, le texte, on a essayé de le lire mais c'est difficile de le comprendre. 
        Cependant si on regarde bien, les éléments de cette image nous racontent une histoire. Une histoire importante pour nous. C'est celle de la France en 1789.

La déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789

On voit : 

    un curieux triangle lumineux
    deux femmes, une porte une couronne, l'autre a des ailes et un bâton
    des nuages
    des chaînes
    des feuilles de chêne
    un serpent qui se mord la queue
    un bonnet rouge au bout d'une pique

    L'oeil de la Raison

    L'oeil de la Raison éclaire de ses Lumières la France et la justice. Il remplace le symbole de la monarchie absolue. 

    La femme de gauche est la France

    La femme de gauche est la France, elle porte une couronne et un manteau bleu à fleur de lys. La France est devenue une monarchie constitutionnelle. Elle a brisé les chaînes dans lesquelles la maintenait la monarchie absolue de droit divin. Les nuages qui sont derrière représentent l'obscurantisme et l'abscence des libertés fondamentales de l'ancien régime qui s'éloigne. 

    La femme de droite est la justice

    La femme de droite est la justice, ce n'est pas un bâton mais son spectre qu'elle tient dans la main gauche et avec lequel elle montre l'oeil rayonnant des Lumières qui la guide. De sa main droite elle indique les nouvelles règles qui vont commander les relations entre les Français : les droits naturels qui définissent les libertés fondamentales. 

    Le serpent qui se mord la queue

    Le serpent qui se mord la queue représente la sagesse de la France. Il encercle un bonnet rouge : le bonnet phrygien. Dans l'Antiquité, les anciens esclaves affranchis, en Phrygie, portaient ce bonnet pour montrer qu'ils étaient libres. 

    Le faisceau

    Le faisceau montre la force militaire de la France. Cette force est contrôlée. C'est pour les pays voisins un message. Le peuple français n'attaquera personne mais a les moyens de se défendre si on l'agresse. 

    Le Chêne

    Le Chêne c'est l'arbre roi de la forêt. C'est un arbre solide et fort, comme la France.

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    En 1848, les droits naturels sont loin d'être respectés. Cette lecture d'image est belle et généreuse, mais elle est loin de correspondre à la réalité. L'Abbé Grégoire dès 1789 avait demandé que ces droits soient appliqués aux Noirs libres ou non. La Convention en 1794 abolit l'esclavage mais ne se donna pas les moyens de faire respecter ses décisions. 
        V. Schoelcher, fils spirituel de Grégoire, en 1833 dans l'esclavage des Noirs reprend le flambeau juste après la mort de celui-ci :
     

    "Le nègre nait essentiellement libre, puisque les hommes ont fait de la liberté un de leurs attributs primitifs ; le pacte qui  l'aurait fait esclave est illégal ... La liberté individuelle est antérieure à toutes les lois humaines ; elle fait corps avec nous, et aucune puissance imaginable ne peut consacrer la violation de ce principe naturel. L'homme a le droit de reprendre par la force ce qui lui a été enlevé par la force, l'adresse ou la trahison ; et pour l'esclave, comme pour le peuple opprimé, l'insurrection est le plus saint des devoirs."

        Cette histoire de droit à l'insurrection n'est pas dans la déclaration de 1789. Elle apparait dans celle de 1793, dite aussi déclaration montagnarde. 

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    Le texte de la déclaration :
     
    Déclaration des droits  
    de l'homme et du citoyen  
    du 26 Août 1789 
     

            Les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous. En conséquence, l'Assemblée nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Etre suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen. 

     
    Article 1er 

     Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. 

    Article 2 

     Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression. 

    Article 3 

     Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément. 

    Article 4 

     La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi. 

    Article 5 

     La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas. 

    Article 6 

     La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. 

    Article 7 

     Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l'instant : il se rend coupable par la résistance. 

    Article 8 

     La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. 

    Article 9 

     Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi. 

    Article 10 

     Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi. 

    Article 11 

     La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. 

    Article 12 

     La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée. 

    Article 13 

     Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. 

    Article 14 

     Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée. 

    Article 15 

     La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. 

    Article 16 

     Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution. 

    Article 17 

     La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.